Comme des millions de Français, je suis assis devant mon bureau à effectuer du télétravail sur mon ordinateur, confinement oblige. L’arrivée du coronavirus (Covid-19) en France a bouleversé notre façon de travailler, pour le meilleur… mais pas seulement. Car rester dans une même position pendant plusieurs heures, ça peut induire un mal de dos dont on se serait passé volontiers.
Ce coronavirus semble favoriser fortement le télétravail puisque les mesures de confinement prises par le gouvernement limitent la possibilité aux citoyens d’aller travailler à l’extérieur quand ils peuvent le faire depuis chez eux. Cela ne peut bien entendu pas concerner tout le monde, mais les chiffres sont clairs : nous sommes de plus en plus à télétravailler.
Travail + confinement = télétravail
Il faut savoir qu’aux États-Unis, on parle d’un taux de télétravailleurs supérieur à 30% de la population active! Et ce bien avant l’arrivée de ce Coronavirus. C’est beaucoup non?
En France, les chiffres sont bien en dessous de ceux des États-Unis mais n’oublions pas que nous avons bien souvent quelques années de retard sur les modes, les techniques marketing, et de manière plus globale sur ce tout ce qui est lié de près ou de loin au business.
En 2017, le télétravail chez les salariés français représentait 25 % selon l’étude Le Comptoir de la nouvelle entreprise de Malakoff Médéric Humanis.
On remarque que l’on parle dans cette étude d’un pourcentage de personnes sur la population de salariés cette fois-ci et non sur la population active.
En 2018, ce chiffre subit une progression de 4% et monte à 29 % des salariés français. Cela représentait 5,2 millions de personnes en France.
En 2019, on passe même la barre des 30 % chez les salariés français.
Il faut cependant modérer ces chiffres puisque dans la majorité il ne s’agit que de télétravailleurs non contractualisés et travaillant occasionnellement en télétravail. Moins de 10 % des salariés télétravailleraient de façon officielle et contractualisée et donc à temps plein selon la même étude.
La hausse généralisée du télétravail peut néanmoins être remarquée d’année en année. Pendant le confinement, on parle d’une augmentation supplémentaire de 20 % sans en connaitre réellement les chiffres au moment où j’écris cet article. Nous sommes donc plusieurs millions à être assis des heures durant à notre bureau devant notre ordinateur, et pour certains d’entre nous cela provoque des douleurs.
Télétravail et mal de dos
Pourquoi ai-je des douleurs (au dos, au genou, au cou etc…) qui apparaissent pendant le confinement?
J’ai envie de vous répondre simplement : parce que vous bougez moins.
Le maintien d’une posture prolongée quelle qu’elle soit implique des douleurs.
Ce qui provoque les douleurs est, dans ces cas-là, le maintien d’une posture prolongée trop longtemps. Lors d’une posture fixe prolongée dans le temps, on va voir des tensions musculaires apparaître. On va voir également un épaississement du liquide synovial devenant plus visqueux et augmentant alors la pression dans l’articulation immobile.
Dans le cas d’une position assise prolongée, on va généralement retrouver une posture en cyphose thoracique (dos vouté) associé à une hyperextension cervicale (pour regarder l’écran d’ordinateur). Ceci correspond à accentuer les courbures naturelles de la colonne vertébrale de manière prolongée.
On a beau essayer de se tenir droit, on y parvient pendant une demi-heure et on se surprend 1h plus tard complètement avachis. En réalité même en se tenant parfaitement droit, on pourrait développer un mal de dos si on ne bouge pas régulièrement.
Télétravailleur VS maçon
En tant que kiné, j’ai remarqué qu’un grand nombre de motifs de consultation est le mal de dos. Savez-vous quelle profession exerce la majorité des patients ayant ce motif de consultation ? Ce sont des personnes qui travaillent devant un bureau, assises toute la journée ou des personnes ayant un mode de vie sédentaire à l’excès.
J’ai peut-être soigné 2 maçons pour le moment dans ma carrière sur plusieurs milliers de patients. Une fois que l’on a fait ce constat, il faut essayer de comprendre pourquoi on arrive à ce résultat alors que, à première vue, les maçons portant des charges lourdes auraient davantage de chance de se faire mal au dos.
On peut noter que le maçon bouge durant toute sa journée de travail, ce qui sollicite ses articulations dans toute leur amplitude. Non seulement il est mobile, mais en plus il porte des charges et se retrouve souvent dans des positions nécessitant une sangle abdominale solide. Il s’est constitué une musculature qui va jouer un rôle de protection. Enfin, puisque qu’il porte des charges, le maçon connait les bons gestes à réaliser pour protéger son dos.
Oui mais… quelles solutions?
Si vous travaillez sur un ordinateur de bureau, assurez vous que votre écran se situe à peu près au niveau de votre regard lorsque vous vous tenez droit. Si ce n’est pas le cas, sur-élevez votre écran en le posant sur une pile de livre ou n’importe quel autre support.
Dans le cas où vous travaillez sur un ordinateur portable, ceci est difficilement possible puisque vous devriez décoller les coudes pour écrire sur le clavier. Ceci n’est pas souhaitable pour vos épaules. Ce qu’il faut faire c’est incliner son écran à plus de 90°. L’angle de 120° me parait être optimal pour lutter contre cet « avachissement progressif » puisque dès lors que le niveau de nos yeux baisse, l’impression de luminosité de notre écran placé à 120° diminue aussitôt et nous rappelle à la « bonne » posture.
Pour celles et ceux qui n’auraient pas l’habitude de taper à l’ordinateur, il faut impérativement garder vos paumes de mains posées et faire travailler un maximum de vos dix doigts lorsque vous taper sur le clavier. Cela vous évitera de développer une méchante tendinopathie… et oui!
Bougez souvent, et renforcez-vous
Le conseil suivant va être de bouger, s’incliner, pivoter, serrer les omoplates, vous dégourdir les jambes bref… Mobiliser la ou les zones douleurs en faisant des mouvement. Vous vous doutez bien que d’aller marcher quand on a mal au dos n’est pas le plus approprié. Si on a une douleur au genou, là oui ça peut être intéressant.
Les douleurs entre les omoplates sont les plus fréquentes lorsque l’on est assis de manière prolongée. Je vous conseille de serrer les omoplates une dizaine de fois et de manière régulière. Ceci va permettre de mobiliser vos omoplates, ainsi que de faire travailler vos muscles trapèzes. Solliciter vos vertèbres thoraciques en extension, inclinaison gauche et inclinaison droite peut aussi être intéressant.
Pour terminer, le plus important est de pratiquer des exercices pour conserver votre masse musculaire et se renforcer.
Le corps est un partisan du moindre effort. Quand il voit que vous n’utilisez plus votre muscle, et bien il se dit que votre « excès » de cellules musculaires inutilisées ne sert à rien. Cela produit une disparition de ces cellules : le catabolisme.
C’est pourquoi il est important de faire un minimum d’exercices physiques ciblés pour lutter contre cette amyotrophie. Il ne s’agit pas de vous mettre à la musculation mais de reproduire les stimulations naturelles qu’exerçait votre environnement sur vos muscles avant le confinement.
Si on résume, le trio gagnant pour lutter contre ces douleurs est…
- Vous mettre dans de bonnes conditions de travail pour avoir une posture respectant au maximum les courbures naturelles de votre colonne vertébrale.
- Bougez le plus souvent possible même depuis votre chaise et dans tous les sens qui pourrait stimuler votre zone douloureuse.
- Effectuer des exercices pour renforcer les muscles et éviter l’amyotrophie.
Il faudra appliquer ces différents conseils pendant plusieurs jours avant d’avoir des résultats, donc ne lâchez pas et continuez de renforcer votre corps… même après le confinement.